La déroute électorale de France Insoumise lors du scrutin européen du 26 mai provoque aujourd’hui un débat logiquement passionné au sein de FI et, plus largement, dans la gauche radicale.
Loin de fournir une contribution globale sur les raisons de l’échec et les moyens de le dépasser – genre “bilan et perspectives” – je souhaite ici seulement souligner un point de méthode.
S’attachant à cerner les raisons de la défaite, plusieurs contributions mettent l’accent souvent de manière unilatérale soit sur la situation politique et sociale soit sur les faiblesses et les erreurs politiques de France Insoumise. Du coup, on risque d’avoir un remake (indécidable comme souvent) du débat sur l’importance respective des « causes objectives » et des « causes subjectives », avec variations imposées sur le pessimisme de l’intelligence et l’optimisme de la volonté.
L’élément important, selon moi, est que les fameuses causes « objectives » et « subjectives » ont les unes et les autres leurs capacités explicatives, mais qu’elles n’éclairent pas la même dimension des résultats.
Pour le dire brutalement, à l’opposé des bêtises habituelles sur « la gagne », « la ligne » ou « la division », c’est bien la situation politique – construite par plusieurs décennies de défaites sociales ininterrompues et d’expériences mortifères de gouvernements sociaux-libéraux – qui explique le faible score cumulé des listes de gauche (et écologiste) : moins de 33 % des suffrages, un score d’ailleurs comparable à celui des scrutins précédents récents (dont la dernière élection présidentielle). Franchement, aucune campagne, aucune orientation, aucune incarnation n’auraient pu modifier fondamentalement ce résultat-là. Oui, je sais… c’est frustrant ! Je ne développe pas plus ici ce point, mais c’est évidemment essentiel puisque cela fixe le cadre global – qui, d’ailleurs, n’est pas seulement hexagonal – dans lequel nous évoluons. Et qui, honnêtement, cela fixe de limites assez contraignantes à ce que nous pouvons espérer.
Par contre, cette “explication objective » ne dit absolument rien sur la manière dont se déclinent ces 33 % de suffrages entre les différentes composantes de la gauche et de l’écologie. Ni, surtout, comment cette déclinaison a évolué de façon déplorable au cours des deux dernières années. Ni pourquoi la proportion des suffrages France Insoumise (par rapport au total des suffrages de la gauche et de l’écologie) représente respectivement 70.75 % à l’élection présidentielle, puis 49.42 % lors des législatives. Et seulement 20 % lors de l’élection européenne.
Une évolution aussi rapide et spectaculaire ne peut renvoyer uniquement à la situation politique ou encore à la nature différente des scrutins. Il y a forcément une explication politique et même vraisemblablement plusieurs explications touchant (dans des proportions à débattre) à ce qu’est France Insoumise : sa nature, son orientation (ses orientations ?), son fonctionnement ou encore tout autre élément éventuel que l’on pourrait évoquer. Et naturellement ceci légitime absolument les discussions en cours …
François Coustal