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Mon école va craquer !

Alors que la vague Omicron est au plus haut, le nouveau protocole sanitaire dans les écoles provoque la colère des personnels. À l’initiative du SNUipp-FSU, rejoint par le Se-Unsa, le Snudi FO, le Snes Fsu, le Snalc, Sud éducation, la CGT éducation, les enseignant-es sont appellé-es à la grève le 13 janvier. Le SNUipp-FSU Paris annonce plus de 75 % de grévistes et au moins 230 écoles fermées (sur 653) dans la Capitale. Denis Parès est responsable syndical du SNUipp-FSU Paris.

Comment expliques-tu la colère des enseignant-es et le rejet de JM Blanquer en cette rentrée ?

Les enseignant-es en ont ras-le-bol d’être méprisé-es par Blanquer. Nous avons encore une fois appris le changement de protocole par voix de presse quasiment la veille de la rentrée. Le Ministre passe son temps dans les médias sans jamais se donner la peine d’informer directement les enseignant-es ou leurs représentant-es.

Mais ce qui a surtout fait déborder la colère c’est l’inadaptation de ce nouveau protocole. Non seulement, il ne protège ni les personnels, ni les élèves, ni les familles, puisqu’il laisse le virus circuler dans les classes. Mais surtout il désorganise l’école et ne nous permet plus de mener les apprentissages de nos élèves de façon satisfaisante. Concrètement, si un élève est testé positif, tous les parents doivent venir chercher les autres enfants de la classe au fil de la journée. Certains les ramènent dans la journée ou le lendemain avec un test négatif. Deux jours après, deuxième test obligatoire, si un autre élève est testé positif, tous les enfants doivent quitter à nouveau la classe… évidemment cela n’empêche pas le virus de circuler et c’est tout simplement ingérable pour mener convenablement la classe.

De plus, toutes les aspects administratifs reposent essentiellement sur les directeurs-trices qui sont surchargé-es de travail. Sans compter les éventuelles tensions avec les parents qui doivent s’absenter de leur travail alors qu’aucune règle ne contraint les employeurs à leur permettre de garder leur enfant.

Ajoutons le manque de personnel pour assurer les remplacements alors que de plus en plus de collègues sont malades. Aujourd’hui, dans l’urgence, le Ministère doit faire appel aux collègues retraité-es et à des contractuel-les. Le Recteur de Paris a même appelé « les mères de familles » pour remplir ces missions. Et dans le même temps, le Ministre continue d’affirmer que « les absences sont remplacées à quelques exceptions près ».

Le gouvernement et le Ministre racontent tout simplement des mensonges lorsqu’ils affirment vouloir maintenir les écoles ouvertes pour le bien des enfants. Il s’agit en réalité de faire de l’école une garderie pour permettre aux parents d’aller travailler.

C’est insupportable alors que ce sont les enseignant-es qui, depuis le début de la pandémie, ont porté l’école à bout de bras.

Quelles sont vos revendications ? Souhaitez-vous la fermeture des écoles ?

Non, nous voulons que les écoles restent ouvertes. Le premier confinement et l’enseignement à distance ont été très difficiles pour l’ensemble de la profession. D’autant que, durant cette période, les inégalités entre enfants se sont aggravées au détriment des classes populaires. Il faut cependant empêcher la diffusion du virus, nous pourrions revenir par exemple à un protocole de fermeture de classe pour une semaine au premier cas de covid confirmé. Même si l’enseignement à distance s’avère compliqué, cela reste le plus gérable en terme de programmation des apprentissages. Nous demandons également qu’un nouveau protocole fasse l’objet d’une réelle concertation avec la profession et les représentant-es des personnels. Ce protocole doit impérativement permettre de baisser la charge de travail des directeurs-trices qui vont exploser si la situation perdure.

Il ne faut bien évidemment oublier les revendications qui concernent la fourniture par l’éducation nationale du matériel de protection pour ses personnels : des masques FFP2 ou au minimum chirurgicaux, des capteur de CO2, des purificateurs d’air lorsque c’est nécessaire…

Nous revendiquons enfin des moyens humains pour assurer l’ensemble de nos missions dont les remplacements. C’est-à-dire recruter d’urgence des professeurs des écoles fonctionnaires sur la liste complémentaire et planifier l’ouverture des places au concours 2022 en conséquence.

Au-delà de la journée du 13, quelles suites envisagez-vous ?

Il faut bien comprendre que nous sortons d’une période pendant laquelle les mobilisations ont été étouffées par la pandémie. Cela n’a pas empêché Blanquer de continuer à transformer en profondeur de l’école selon une vision très idéologique de l’enseignement et par un management autoritaire. Frédéric Grimaud parle d’une forme de prolétarisation du métier enseignant-es (blog mediapart https://blogs.mediapart.fr/fredgrimaud/blog/030221/precarisation-et-dequalification-une-double-proletarisation-au-coeur-de-l-oste). Ces évolutions et la situation pandémique ont été un facteur d’atomisation de la profession.

Dans ce contexte, le SNUipp-FSU a su prendre une initiative rapide qui a permis que se cristallise une colère légitime qui serait peut-être retombée si l’appel à la grève avait plus tardé. Mais, nous n’avons pas encore réuni le conseil syndical parisien pour en discuter et nous n’avons pas encore réuni les collègues en assemblée générale et nous avons encore du mal à mesurer le degré de combativité.

Donc beaucoup d’inconnues qui nous donnent une responsabilité particulière pour proposer des perspectives après une telle démonstration de force.