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La République… mais sans la Révolution ?

La dernière polémique en date à propos d’un tweet de Jean-Luc Mélenchon évoquant la marche des femmes d’Octobre 1789 est a priori tout à fait étonnante : après tout, la geste de la « Grande révolution » – celle qui a établi la « République » – est censée faire partie du patrimoine commun. A tel point d’ailleurs que, la semaine passée, ce n’est absolument pas Mélenchon qui a, le premier ravivé, ce souvenir révolutionnaire… mais les responsables français de l’organisation des Jeux Olympiques. En effet, l’aller-retour Paris-Versailles-Paris sera le parcours de l’une des épreuves les plus importantes, le marathon. Et ce parcours ne doit rien au hasard, comme l’indique Aurélie Merle, directrice des compétitions sportives au sein de Paris 2024 : « Nous nous sommes inspirés de la marche des femmes des 5 et 6 octobre 1789 (…) Cet événement fondateur populaire, révolutionnaire et féminin, est un trait d’union avec les valeurs de Paris 2024, où nous mettons notamment les femmes à l’honneur. » Tony Estanguet, le président du Comité d’organisation des Jeux de Paris 2024, le confirme : « C’est un marathon qui revisite l’histoire de France ».

Mais, évidemment, tout change lorsque Mélenchon rebondit sur l’événement ! Finalement, les réactions outrées de la classe politique sont tout à fait révélatrices de ce qu’est vraiment la pensée dominante s’agissant de la Révolution française, au delà d’un très superficiel vernis « républicain ». Ainsi, ce pauvre Olivier Faure prend bien soin de souligner que le 16 octobre nous n’aurons « ni fourches ni piques ». Franchement, on s’en doutait un peu… Mais la caste médiatique n’est pas en reste. Parmi beaucoup d’exemples possibles, on retiendra le Point où le dénommé Loris Chavanette, présenté comme « historien, spécialiste de la Révolution française », croit discerner dans les propos de Mélenchon une « vision communiste de la Révolution française ». On pense aussi à l’inénarrable Jean-Michel Apathie. Cet ennemi résolu du journalisme d’investigation – activité sans doute plus fatiguante que de faire « l’éditorialiste » sur les plateaux télé – a été le dernier défenseur de Jérôme Cahuzac ! Vendredi dernier sur LCI, il s’en est pris vertement aussi bien à Mélenchon qu’au Comité olympique au motif que l’on ne saurait célébrer des événements marqués par la violence. Pas très originale cette dénonciation de la violence lorsqu’elle vient des pauvres et seulement lorsqu’elle vient d’eux…

En fait, tous ces hérauts du système veulent bien la République…

La République, mais sans l’Egalité qui menace leur pouvoir

La République, mais sans l’abolition des privilèges, de leurs privilèges.

La République, mais sans la Révolution qui l’a rendue possible.

Et, surtout, la République, mais sans l’intervention des couches populaires qui l’ont imposée.

Parce que c’est, au fond, cela qu’ils craignent vraiment : le peuple.

Comme l’avait si bien vu Jean Ferrat (Bicentenaire, 1991) à propos des festivités du bicentenaire de la Révolution française :

Deux siècles après quatre-vingt-neuf
D’autres seigneurs veillent au grain
Et toi qui vivais comme un bœuf, ce sont tes maîtres que l’on plaint

À six pieds sous terre, ton bicentenaire, ils l’ont enterré bel et bien
Pauvre Martin, pauvre misère, c’est toujours le peuple qu’on craint

François Coustal