« Comment sortir du bourbier sur la ZAD ? » interroge sur toute sa « une » le quotidien Presse Océan de ce jour. « L’expulsion de la ZAD tourne au fiasco et les manifestations continent » titrait pour sa part Ouest-France dans son édition dominicale du 15 avril, le journaliste Jean-François Martin concluant ainsi son article « Au bout du compte, après plus de 4 000 grenades tirées, non seulement la situation ne s’est pas arrangée d’un iota mais, au contraire, s’est aggravée par rapport à lundi matin, début de l’opération. Il faudra du temps, beaucoup de temps, pour faire revenir l’Etat de droit dans la ZAD ».
A ces constats de la presse locale, le Président de la république a réaffirmé « tout ce qui devra être évacué le sera », reprenant à son compte l’échéance du 23 avril, fixée par la Préfète de Région, pour proposer un éventuel projet agricole. « Je n’ai jamais signé avec un pistolet sur la tempe » a déjà fort justement répondu Dominique Fresneau, le co-président de l’ACIPA, soulignant les conditions de l’apaisement « Il faudrait que l’Etat arrête de taper et qu’il libère les routes. Les gens ont du mal à circuler, les postiers sont arrêtés par les gendarmes, une infirmière est contrôlée dix fois par jour. Il y a de la tension à Notre-Dame-des-Landes. Il est anormal que la D 81 et la D 42 le soient pas libérés et qu’EDF coupe le courant. C’est pour peser sur les riverains, pour qu’ils se retournent contre la ZAD. Les riverains attendent un signe d’apaisement de l’Etat »(Presse-Océan, 16 avril)
Ce lundi, non seulement nul signe d’apaisement, mais toujours les lacrymos et les charges de gendarmes, y compris pour détruire ce matin la belle charpente en bois réalisée et posée hier soir. Et toujours des centaines de bénévoles sur la ZAD pour soutenir la résistance. « Il y règne un parfum de mai 68, toutes les générations s’y côtoient et chacun.e à sa manière résiste collectivement à des destructions et des violences que tout le monde trouve stupides » commente Christine, une camarade d’Ensemble, en plein ramassage de grenades pour tenter de limiter la pollution des terres agricoles. Il y a quelques jours, Sylvain Fresneau, un des paysans historiques de la ZAD et une des chevilles ouvrières de la lutte victorieuse contre le projet d’aéroport, rappelait que 6 ans après l’opération César, les terres souffraient encore des gazages intensifs subis !
C’est peu dire qu’après les déclarations de Macron, plus personne ne se risque à imaginer à court terme une hypothétique issue « pacifique et raisonnable ». Mais ce week-end s’est affirmée une mobilisation puissante et déterminée en solidarité avec la ZAD, avec sans doute près de 10 000 manifestant.e.s à Nantes samedi après-midi et dimanche encore près de 10 000 personnes sur le site de la ZAD, malgré là encore une présence policière agressive et dissuasive.
Ces mobilisations sont la meilleure des réponses face à la volonté affirmée par le Président de la république de « gagner par KO », non seulement parce qu’elles le rendent quasi impossible, sauf aux prix de dégâts humains encore plus dramatique (« De multiples blessé de part et d’autre. Mais sans aucun mort », écrivait dimanche le journaliste d’Ouest-France) , mais surtout parce qu’elles inscrivent pleinement la résistance de la ZAD dans celle des multiples luttes actuelles contre les contre-réforme de Macron et contre sa politique autoritaire et répressive.
C’est à ce jour la seule réponse raisonnable pour sortir du bourbier dans lequel Macron et son gouvernement ont plongé la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, en voulant détruire par la force dix années de luttes et d’expérimentation d’un autre commun possible.
François Preneau, le 16 avril 2018.