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Trump attise la guerre, Macron enregistre un nouvel échec diplomatique…

Décrétant Daesh vaincu, la brusque décision de Donald Trump du retrait des troupes états-uniennes de Syrie est porteuse de graves dangers pour cette région du monde. Elle ne va pas dans le sens d’une démilitarisation de ce pays mais ne peut, au contraire, qu’attiser la guerre. 
Ce départ laisse le champ libre à une intervention militaire de grande ampleur contre le Rojava, menée par le régime belliqueux d’Erdogan en Turquie, auquel les Etats-Unis viennent de vendre pour 3,5 milliards de dollars de missiles Patriot. Pourtant cette zone, sous la direction du parti kurde PYD, représente malgré ses limites, une expérience progressiste dans cette région du monde. Mais l’offensive du régime d’Erdogan vise à écraser toute aspiration à l’autonomie politique kurde en Syrie et en Turquie.
Le départ des troupes états-uniennes incitera également le régime dictatorial d’Al-Assad et ses alliés (régimes iranien, russe et Hezbollah) à entrer dans une course de vitesse pour reconquérir les même territoires. Ces offensives à venir comme les alliances de circonstance, synonymes de partition de facto de la Syrie en zones d’influence, ne prennent aucunement compte des intérêts des populations après l’écrasement de la révolution dans ce pays. Or, Daesh n’est pas encore définitivement militairement vaincu, et l’absence de perspectives politiques pour les masses arabes sunnites de Syrie écrasées par un joug dictatorial risque fort de continuer à alimenter Daesh ou un succédané de Daesh.
Cette décision de Donald Trump constitue enfin un désaveu cinglant pour Macron qui comptait « convaincre » le Président americain de ne pas agir de la sorte en comptant sur leurs « bonnes relations » personnelles. Or, non seulement de telles « relations » ne sont en aucune façon un gage politique sur ces questions mais une telle idée frôle le ridicule avec une personne au comportement aussi erratique que Trump. Sous couvert d’un pseudo-réalisme qui n’est qu’un aveuglement à courte vue, la France s’est privé de développer une approche consistante et en mesure de contribuer à répondre à l’urgence actuelle.
Déjà lors de la bataille d’Affrin, le gouvernement et la majorité avaient foulé au pied les droits de l’Homme en refusant de voir en Erdogan une menace pour la paix. La France, ne souhaitant pas froisser son allié membre de l’OTAN, n’avait pas dit un mot en défense de ces combattantes et combattants kurdes. Aujourd’hui encore, la diplomatie française détourne le regard, nous confirmant une nouvelle fois que Trump et Macron font partie du problème et non de la solution pour faire face aux enjeux globaux auxquels le monde est confronté.
Le départ des troupes étrangères de Syrie doit être globale. Une protection multilatérale doit être assurée par des pays non impliqués et fournie aux populations locales afin qu’elles puissent construire leur avenir sans dictature. Le retour des réfugiés ayant fui la Syrie doit également être un droit assuré par cette protection multilatérale sans laquelle le retour ne signifierait rien d’autre qu’un aller simple vers la mort, les geôles d’Al-Assad ou différentes formes de répression tout en alimentant le terreau dont se nourrit Daesh.
Siégeant à la commission des affaires étrangères, je compte bien interpeller dès que possible le gouvernement sur cette situation dramatique. Et lui rappeler cette phrase d’Edmond Burke : «Pour que le mal triomphe, seule suffit l’inaction des hommes de bien.»
Clémentine Autain