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Syndicalistes antiracistes !

 

Pari réussi pour cette première édition du Forum Syndical Antiraciste, tant par la participation que par la qualité des débats. En effet, ce sont environ 120 personnes qui ont assisté aux travaux de ce Forum sur l’ensemble de la journée, dont une très large majorité de syndicalistes de Solidaires, de la CGT et de la FSU,  de salarié-e-s issues de l’immigration, syndicalistes ou non, de sans-papiers, notamment du Collectif des Sans-Papiers de Vitry, de représentant-e-s d’association de salariés racisé-e-s: “droit à la différence” à la SNCF, actrice du long combat judiciaire victorieux des Chibanis, du CLAPPE de l’Education Nationale, des Panthères des ministères, de structures et de militants antiracistes FUIQP

Ce Forum a été initié par un appel de plusieurs dizaines de syndicalistes de Solidaires, de la CGT et de la FSU, a partir du constat que “Le syndicalisme a parfois du mal à se saisir des enjeux du racisme au travail: discriminations à l’embauche, assignation à des postes subalternes (…).  Si de nombreuses expériences de luttes contre le racisme existent, dans différent secteurs et menées par différents syndicats, (…) il est urgent de nous donner les moyens et les outils pour faire de la lutte contre tous les racismes un combat pleinement syndical”

Said Bouamama, figure intellectuelle et militante de l’antiracisme et de l’anticolonialisme, et Sabina Issehnane,  Maitresse de conférence en économie du travail, ont introduit les débats en assemblée plénière le matin. Il s’agissait pour la première intervention de replacer les discriminations raciales au travail dans le fonctionnement général au capitalisme qui tend à instrumentaliser à son profit toutes les divisions internes potentielles à la force de travail : genre, âge, « race ». La deuxième intervention a permis de documenter solidement la réalité des discriminations raciales au travail et sur le marché de l’emploi dans toute leur étendue.

S’en est suivit un débat dense avec de nombreuses prises de parole alternant réflexions générales, récits d’expériences variées, questions aux intervenant-e-s et affirmation de l’urgence d’agir face au retard considérable prit sur la prise en compte des discriminations raciales au travail.

L’après-midi s’est ouvert par des travaux en ateliers : quelles revendications antiracistes au travail, quelle auto-organisation des salarié-e-s racisé-e-s, quelle lutte des sans-papiers en lien avec la campagne “Egaux/Egales, personne n’est illégal”. Signe du fort intérêt porté à cette initiative par les participants, ils et elles ont été nombreu-ses-x à investir ces ateliers, avec des débats à nouveau riches.

La journée s’est conclue avec un débat sur les relations à établir entre syndicats et organisations antiracistes, introduit par le Front Uni de l’Immigration et des Quartiers Populaires (FUIQP). Le CCIF, également invité, n’a malheureusement pu être présent.

Une déclaration finale a été adoptée qui se félicite du succès de l’initiative et liste les perspectives de travail qui ont émergé : « Mettre sur pieds un centre de ressource et d’aide à l’organisation, qui soit aussi support de campagne, groupe de veille et d’accompagnement juridique, d’analyse et d’élaborations de revendications, espace de solidarité collective et de coordination : autant de chantiers que nous nous sommes donné à explorer après cette première initiative. »

Une dynamique syndicale antiraciste, avec un agenda revendicatif, des propositions pratiques et de nouvelles échéances à venir est donc bel et bien lancée : « Régularisation de toutes et tous les sans-papiers, égalité au travail, droit aux congés bonifiés… : pour avancer sur tout cela, parce que c’est une urgente nécessité, nous nous retrouverons donc très prochainement pour prendre une nouvelle initiative publique en octobre prochain »

Enfin, il était incontournable de se prononcer sur la dernière attaque odieuse contre les mamans musulmanes portant le foulard, accompagnatrices de sorties scolaires : « À l’heure où le Sénat vote l’interdiction des sorties scolaire pour les mères voilées, il est de notre responsabilité de réagir et de nous organiser ».

Ce bilan très positif pour cette première édition ne doit pas masquer néanmoins certaines faiblesses, à commence par une très inégale participation des syndicats concernés qui limite les retombées potentielles au sein de chacune de ces structures. C’est d’autant plus regrettable que chacune d’entre elles mènent une activité et ont accumulé une expérience incontournable sur certains sujets dans cette matière, notamment concernant la lutte des travailleurs sans papiers. Une explication de cette faiblesse peut résider dans le fait que l’initiative était portée par des syndicalistes et non par des structures syndicales es qualité. A contrario, à ce stade, il paraissait très aléatoire d’organiser une initiative de structures syndicales avec le périmètre souhaité. Reste que pour la suite, le transfert de l’organisation de l’évènement par des syndicats est une nécessité pour en élargir l’audience et mettre en œuvre les propositions. Cela tombe bien c’est ce qui est explicitement souhaité..

Alain Mathieu