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Santé danger !

Le projet de loi de Financement de la Sécurité Sociale 2024 aggrave l’effondrement de notre système de Santé et les inégalités d’accès aux soins.

Avec un Objectif National de Dépenses d’Assurance Maladie (ONDAM) à seulement +3,2 %, soit bien moins que l’inflation, le gouvernement prévoit concrètement un budget santé en régression en euros constant. Il accélère l’effondrement de notre système public de santé, en ville comme à l’hôpital, dans les services sociaux et les Ehpads.

L’objectif est annoncé : 3,5 milliards d’économies sur l’assurance maladie, 15 milliards sur les services publics au nom du respect des orientations budgétaires prônées par la commission européenne.

Pourtant, la situation du système de soins est déjà bien dégradée et mérite d’être rappelée :

  • Les difficultés d’accès aux soins auprès d’un médecin en ville ou en campagne se développent. Prendre un rendez-vous est un parcours du combattant dans certaines zones rurales mais aussi urbaines. Conséquences du manque de professionnel-le-se, elles ont entrainé la saturation des consultations aux urgences…qui elles mêmes manquent de personnel.
  • Les fermetures de lits à l’hôpital entrainent des délais d’attente inacceptable pour trouver un lit à un malade et régulièrement les couloirs des urgences se transforment en parking à brancards ce qui augmente les risques. l’association Samu Urgences de France estime, après enquête, que 1500 à 2000 morts auraient pu être évitées en 2023.
  • Les fermetures des maternités se poursuivent, avec perte de chance pour les femmes enceintes. Une récente étude a montré que le nombre d’accouchements hors maternités (c’est-à-dire concrètement dans le camion des pompiers ou sur le bord de la route) avait augmenté. Les services de néonatologie viennent de lancer une alerte sur les grandes difficultés de prise en charge des nourrissons et la mortalité infantile (mort d’enfants de moins d’un an pour 100 000 naissances) en France augmente depuis plusieurs années. Depuis 2012, la France est passée en Europe de la 3eme place à la 20eme pour la mortalité infantile
  • Le terme de désert médical s’est répandu, et il est devenu très difficile d’avoir un rendez-vous médical. Pour les spécialités et les examens complémentaires c’est encore pire.
  • 600 000 personnes en Affection Longue Durée n’ont pas de médecins traitants et depuis le Covid, les gouvernements Macron ont fermé 10 000 lits supplémentaires.

Ce patient travail de démolition du service public entamé il y a plus de trente ans s’accélère avec ce PLFSS.

N’y trouveront leur compte que les groupes financiers qui ont investi le champ des cliniques lucratives, choisissant les pathologies et les malades ‘’rentables’’ et pratiquant systématiquement les dépassements d’honoraires.

Les assuré·es sociaux, considéré·es comme fraudeurs potentiels voient se multiplier contrôles et reste à charge : les arrêts maladies sous contrôle de médecins choisis par les employeurs, et des annonces sur les indemnités journalières avec un jour de carence supplémentaire et l’augmentation des forfaits sur les boites de médicaments. Pour compléter le tableau, en téléconsultation pourtant présenté comme le bon moyen moderne de consulter : pas d’arrêt maladie de plus de 3 jours !

Par contre, on cherchera vainement des réponses aux questions posées par le fonctionnement de certaines chaines de soin comme par exemple les pseudo centres de santé dentaire, pratiquant dans un but purement commercial des examens inutiles histoire de rentabiliser le matériel, les arnaques à la Sécu pratiquées dans des grands groupes privés comme Orpea et Clinéa (voir le livre sur le scandale) ou par certain·es professionnel·les peu scrupuleux.

On y cherchera aussi vainement des réponses à la question de la pénurie de professionnel·les et la nécessité d’ouvrir beaucoup plus largement les portes des filières santé des facultés et des écoles aux jeunes bachelier·es. Les annonces sur la fin du numérus clausus cachant mal par exemple que dans les faits le nombre de places pour passer en deuxième année reste contingenté.

On y cherchera aussi vainement les mesures qui s’imposeraient dans le champ du médicament pour répondre aux pénuries et rupture d’approvisionnement qui se sont multipliés ces dernières années, produit de la logique de la production à flux tendu et surtout du fait que les grandes entreprises privées du médicament se délestent de médicaments anciens, toujours utiles, jugés moins rentables, au profit de nouvelles technologies et de la production de molécules dont ils imposent le prix aux autorités publiques. On peut par exemple citer ici le cas du Sovaldi qui permet de guérir les porteurs chroniques du virus de l’hépatite C, mis en France sur le marché au prix de 41000 euros le traitement pour un cout de fabrication de quelques dizaines euros. Ce PLFSS prévoit même de revoir la clause de sauvegarde pour les labos ce qui leur fera sensiblement baisser la taxe sur le chiffre d’affaires au-delà de 1,6 milliard.

Face à cette situation, nous avons assisté dans plusieurs villes à des manifestations massives de la population. A Carhaix en Bretagne contre le projet de fermeture de la maternité, se sont plusieurs milliers de manifestant·es qui ont défilé sur place et à Quimper. Également à Bagnères de Bigorre dans les Hautes-Pyrénées contre la fermeture des urgences, des milliers de personnes ont manifesté pour exiger leur réouverture. Même scénario à Langres dans la Haute Marne.

Il s’agit des manifestations les plus visibles, mais il faut aussi indiquer les multiples rassemblements qui ont eu lieu devant les hôpitaux, les mairies ou les préfectures.

L’avenir dira si on est à la veille de mobilisation d’ampleur comme on en a eu en Espagne en février 2023 avec un million de personnes à Madrid en défense du service public ou en Angleterre pour défendre le NHS.

Signalons également le communiqué des associations de directeurs et directrices d’hôpitaux qui dénoncent le fait que l’hôpital et les EHPAD soient la variable budgétaire du déficit public et celui de l’organisation France Asso Santé, fédérant les représentant·es des usager·es dans les instances hospitalières, qui s’est prononcée contre le PLFSS gouvernemental.

Plus récemment, il y a eu aussi les plans régionaux de santé retoqués avec un avis négatif par les votes de la région Bretagne et de la région Ile de France.

Au niveau national, autour des organisations qui travaillent et militent pour le droit à la santé, une réponse s’est constituée en quelques mois à partir de l’appel du tour de France pour la santé. Initié en mai dernier, suite au meeting-procès de Macron sur la base du texte ‘’Nous vous accusons’’. Cet appel est actuellement signé par plus de 70 organisations, syndicales, professionnelles, associatives, ou collectifs pour mobiliser la population sur les enjeux de ce PLFSS. Il regroupe ainsi notamment la fédération Sud sante-sociaux, l’Ufmict-CGT, la FSU, Médecins du Monde, le collectif Notre sante en Danger, collectif inter-urgences, collectif inter-hôpitaux, la coordination nationale de défense des hôpitaux et maternités de proximité, la fédération nationale des orthophonistes de France, femmes solidaires, l’union syndicale de la psychiatrie, le SMG, ATTAC, la CADAC, Act-Up….Bref une grande diversité, la liste compléte pouvant être consulté sur le Facebook ‘’Tour de France pour la santé’’

Celui-ci prend la forme d’initiatives dans les villes et les départements, sur un thème choisi localement en fonction de la situation locale. La forme de l’initiative restant à la main des organisateurs locaux. Manifestation, réunion publique, chaine humaine, rassemblements etc. le point commun : à chaque initiative attribution d’un carton rouge sur les thèmes traités et de cartons verts pour les revendications. Tout cela se résume dans l’objectif annoncé : par l’appel pour un budget de la Sécurité Sociale pour sortir de la crise sanitaire et répondre aux besoins de la population.

A ce jour 80 initiatives sont annoncées et on peut voir une carte interactive sur la page Facebook.

A noter également la pétition initiée par la Convergence de Défense des Services Publics et la Coordination Nationale de Défense des Hôpitaux et Maternités de Proximité issu du rassemblement de Lure sur les services publics l’été dernier et qui accompagne toutes les initiatives prises.

Le Tour de France a commencé le 11 septembre 2023 à Paris en présence de Benoit Teste secrétaire général de la FSU, de la secrétaire générale adjointe de Solidaires, du collectif Notre Santé en Danger représenté par Françoise Nay, de Jean François Corty vice-président de Médecins du monde de Christophe Prudhomme pour l’UFMICT-CGT. Ce Tour de France se déroule à l’occasion du débat parlementaire sur le PLFSS. Il a permis de mettre en relation et de faire agir ensemble dans des configurations unitaires variées selon les lieux mais bien utile dans ces temps de division.

Ce sera l’occasion de mettre en débat les revendications :

Ouverture des formations pour augmenter le nombre de professionnel·les.

Amélioration des conditions de travail, embauches, et revalorisation des salaires et des carrières à l’hôpital.

Arrêt des fermetures de services et des projets de restructurations.

Pour la fin de la tarification à l’activité véritable machine d’étranglement financier.

Pour le déploiement d’un vaste réseau de centres de santé publics pluridisciplinaires répartis sur le territoire.

Pour la mise en place d’un service public du médicament.

Pour en finir avec les exonérations de cotisations sociales pour les entreprises dont profitent les plus grosses (80 milliards d’euros en 2023).

Pour la Sécu à 100%.

Roland Forest