Instagram RSS

« L’Évènement »

Jeanne Menjoulet

De l’émotion. Beaucoup d’émotion dans cette salle de congrès en ce 4 mars 2024. 780 parlementaires sur 925 ont adopté le projet de loi constitutionnelle consacrant la « liberté garantie » pour les femmes de recourir à l’interruption volontaire de grossesse (IVG), qui devient ainsi une liberté fondamentale inscrite dans la Constitution (modification de l’article 34). Toute la gauche a voté pour sans exception. Parmi les contre et les abstentions, des LR, des RN, des centristes et même un macroniste. N’oublions jamais qui défend les droits des femmes et qui prétend les défendre.

L’émotion était visible du côté de celles qui ont mené 18 mois de combat parlementaire pour parvenir à cette adoption, Mathilde Panot (LFI) et Mélanie Vogel (EELV) en tête. Qu’importe les motivations de certain·es ou les retournements de veste de dernière heure (Yael Braun-Pivet, on t’a vue !), il s’était dit qu’on ne pouvait plus faire marche arrière à cet instant. Le prix politique à payer aurait été trop fort. Le mépris fait, à celles qui se sont battues pour ce droit fondamental et à celles pour qui il est aujourd’hui garanti, aurait été trop grand.
Mais à l’annonce du résultat, de Versailles au Trocadéro, ce sont toutes les féministes qui ont laissé exploser leur joie.

Au nom des pionnières, célèbres ou anonymes, au nom des militant·es qui luttent chaque jour en faveur de l’émancipation des femmes, des associations comme le planning familial, tout.es ont mesuré que l’on vivait là une étape fondamentale en devenant le premier pays à inscrire l’IVG dans sa Constitution. Car, dans le domaine des droits des femmes toute avancée n’est jamais définitivement acquise et peut être balayée comme ce fut le cas quand, le 24 juin, la cour suprême des Etats-Unis a annulé l’arrêt Roe vs Wade, qui, depuis 1973, accordait aux Américaines le droit d’avorter dans tout le pays ou comme en Argentine, quand Javier Milei a annoncé avoir pour priorité d’abroger l’avortement.
Dans une période sombre où le droit à l’avortement recule, aux États-Unis, en Europe de l’Est ou en Italie, dans nombre de pays où il est toujours criminalisé, c’est un signal fort donné à toutes les femmes qui luttent contre les obscurantismes. Un signal pour dire «  on est avec vous, on se bat pour vous. »

Bien évidemment, ce n’est pas le droit opposable qui était proposé dans le premier texte qui a été adopté. Cette victoire ne doit pas non plus nous faire oublier, la réalité difficile que vivent celles qui, en France, choisissent d’avorter. 130 centres IVG ont fermé en quinze ans. Faute de centres, de personnels et de transports publics, une femme sur quatre doit changer de département lorsqu’elle souhaite mettre un terme à une grossesse non désirée. Et, dans ce parcours de la combattante, ce sont évidemment les femmes les plus précaires qui, comme dans bien d’autres domaines, rencontrent le plus d’obstacles.
Abroger la double clause de conscience, rendre l’accès à l’avortement effectif, inscrire le droit à l’avortement dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne sont désormais les enjeux de cette bataille qu’il nous faut poursuivre.

Pour nous, c’est décidé, la lutte continue encore et toujours. Le XXIe siècle sera le siècle de nos nouvelles conquêtes, celui des Droits des Femmes.

Valée et Manue